Le Révérend AL SHAPRTON et sa Marche à Washington du 28 août 2020 - Get your Knee off our Necks !
Le Révérend Al SHAPRTON, fortement engagé contre le racisme et pour les droits civiques, prépare une marche pour le 28 août 2020 à Washington ; celle-ci fait écho à la marche de Martin Luther KING en 1963. On se souvient de ce fameux «I have a Dream» en pleine lutte pour les droits civiques aux États-Unis. «Il y a un siècle de cela, un grand Américain qui nous couvre aujourd’hui de son ombre symbolique signait notre Proclamation d’Émancipation. Ce décret capital se dresse, comme un grand phare illuminant d’espérance les millions d’esclaves marqués au feu d’une brûlante injustice. Ce décret est venu comme une aube joyeuse terminer la longue nuit de leur captivité. Mais, cent ans plus tard, le Noir n’est toujours pas libre. Cent ans plus tard, la vie du Noir est encore terriblement handicapée par les menottes de la ségrégation et les chaînes de la discrimination. Cent ans plus tard, le Noir vit à l’écart sur son îlot de pauvreté au milieu d’un vaste océan de prospérité matérielle. Cent ans plus tard, le Noir languit encore dans les coins de la société américaine et se trouve exilé dans son propre pays» constatait Martin Luther KING. Il est évident que l’Amérique a manqué à ses devoirs à l’égard des Noirs qui refusent l’injustice raciale ; il n’y aura pas de paix jusque la Justice soit réalisée. «Je rêve que, un jour, notre pays se lèvera et vivra pleinement la véritable réalité de son credo : Nous tenons ces vérités pour évidentes par elles-mêmes que tous les hommes sont créés égaux. Je rêve qu’un jour sur les collines rousses de Géorgie les fils d’anciens esclaves et ceux d’anciens propriétaires d’esclaves pourront s’asseoir ensemble à la table de la fraternité. Je rêve qu’un jour, même l’Etat du Mississippi, un Etat où brûlent les feux de l’injustice et de l’oppression, sera transformé en un oasis de liberté et de justice. Je rêve que mes quatre petits-enfants vivront un jour dans une nation où ils ne seront pas jugés sur la couleur de leur peau, mais sur la valeur de leur caractère. Je fais aujourd’hui un rêve !» avait dit Martin Luther KING. Venu défendre des ouvriers grévistes à Memphis, et qui scandaient «I am a Man» (je suis un Homme), Martin Luther KING a été assassiné le 4 avril 1968. On a pensé que les deux mandats de Barack OBOMA (2004 à 2016) avaient réalisé le Rêve de Martin Luther KING, mais le premier Noir des Etats-Unis a été remplacé, en 2016, par Donald TRUMP, un président suprémaciste, raciste, homophobe, misogyne, sexiste et unilatéraliste. La mauvaise gestion de la pandémie par Donald TRUMP, plus de 176 000 morts, a affecté, de façon disproportionnée, les minorités ethniques, dont les Noirs.
Cependant cette année le contexte de la Marche du 28 août 2020 est très particulier. L'affaire George FLOYD a changé la face du monde. Un mouvement «Black Lives Matter» est né sous l'égide de Muriel BOWSER, maire de Washington. Joe BIDEN candidat démocrate est venu à l'occasion des funérailles de George FLOYD présenter ses condoléances à la famille et a choisi Kamala HARRIS, une métisse, comme colistière. Joe BIDEN, en raison de ses engagements pour la Justice, est fortement soutenu, notamment, par la communauté noire. «We know him, and he understands us» dit un sénateur noir du Sud, à propos de Joe BIDEN. Un vote massif en sa faveur est attendu le 3 novembre 2020, afin d’éviter l’expérience malheureuse de Hillary CLINTON, qui avait gagné en voix, mais avait perdu face à Donald TRUMP.
Le Révérend Al SHAPRTON a prononcé cet éloge mémorable : «ôtez votre genou de notre cou !» (Get your knee off our necks). On se souvient, tout récemment, et les télévisions du monde entier l’ont retransmis, c’est lui qui a prononcé l’éloge funèbre de George FLOYD (1973-2020), le 4 juin 2020, avec cette phrase choc «ôtez votre genou de notre cou !» et d’ajouter «Le combat commence maintenant, parce que, partout dans le monde, George, ils marchent en scandant ton nom. Le mouvement ne s'arrêtera pas tant que nous n'obtiendrons pas justice. Tu vas manquer à ta famille, George, mais ta nation n'oubliera jamais ton nom. Ta souffrance, c'est celle de nous tous. Va, et pars en paix, nous allons continuer la lutte» dit Al SHAPRTON. Ce thème de la Justice et de la Compassion est au cœur de la campagne des présidentielles américaines du 3 novembre 2020. Un hommage spécial a été rendu à John LEWIS (1940-2020) une des éminentes personnalités de la lutte pour les droits civiques, qui avait participé à la marche de Selma à Montgomery, le 7 mars 1965, et avait eu la tête fracassée. «La vie de John Lewis était, à tant d'égards, exceptionnelle. Engagé politiquement pour les démocrates, il s'est battu pour un meilleur contrôle des armes à feu et réduire les inégalités raciales. L'Amérique a été construite par des John Lewis. (...) Quand nous aurons terminé le voyage vers la liberté, John Lewis sera un père fondateur de cette Amérique meilleure et plus juste. Vous voulez rendre hommage à John ? Remettez en place la loi pour laquelle il était prêt à mourir. Nous pouvons encore voir notre gouvernement fédéral envoyer des agents utiliser du gaz lacrymogène et des matraques contre des manifestants pacifiques» dit Barack OBAMA, lors de son discours du 30 juillet 2020, en hommage à John LEWIS.
Le Révérend AL SHAPRTON veut rallumer la flamme de la Justice, mais il est peu connu du grand public en France et en Afrique, en raison des barrières de la langue. Mais c’est un formidable et infatigable combattant de la cause de l’Homme et de l’égalité réelle. Né le 3 octobre 1954, à Brooklyn, à New York, Al SHAPRTON, pasteur pentecôtiste, à 9 ans, faisait déjà partie des tournées de Mahalia JACKSON (1911-1972), la chanteuse de Gospel qui clôturait les meetings de Martin Luther KING par «We Shall Overcome». Il est ordonné pasteur pentecôtiste, à l’âge de 10 ans, à l’église de Dieu en Christ, à Washington. En 1969, AL SHAPRTON devient Directeur de la section jeunesse de la «Southern Christian Leadership Conference», à New York, dirigée par Jesse JACKSON, également un compagnon de route de Martin Luther KING (1929-1968). Le révérend Jessie Jackson lui confie les rênes de l'opération «panier de pain». Parallèlement à cela il a été le manager du chanteur James BROWN (1933-2006), de 1973 à 1980, qui va l’inspirer dans la lutte pour l’émancipation des Noirs «Il m'a dit «sois unique, défends ton peuple », il m'a même changé mon nom», dit AL SHAPRTON dans ses mémoires. Le 12 janvier 1991, alors qu'il se prépare pour une manifestation pour les droits civiques à Bensonhurst, à Brooklyn, AL SHAPRTON est poignardé grièvement dans la cour d'une école. Il fonde la «National Action Network» afin de mieux combattre l’injustice et les discriminations.
En 2004, candidat aux présidentielles pour l’investiture démocrate, AL SHAPRTON a terminé à une place honorable, en troisième position. Depuis lors, il a réorienté, fondamentalement, ses objectifs de vie : AL SHAPRTON, ce formidable orateur, est cette une puissante voix dénonçant, constamment, une Amérique n’ayant pas honoré ses promesses, et donc confrontée à ses démons de l’esclavage et du racisme. C’est lui qui avait dirigé l’éloge funèbre de Michael JACKSON (1958-2009), le 7 juillet 2009 au Staple Center, à Los Angeles. En effet, pour AL SHAPRTON, le chanteur Michael JACKSON est «celui qui a contribué à briser les chaînes» de la communauté afro-américaine. Michael JACKSON est l’un des maillons ayant permis d’aboutir à l’élection de Barack OBAMA, premier président noir, ayant réalisé le «Rêve de Martin Luther KING». Je vous recommande de lire son autobiographie datant de 1996 : «Go and Tell Pharaoh»,
Cette marche du 28 août 2020 dépasse le cadre américain. En France, et dépit du déni du racisme systémique et institutionnel, ainsi que des violences policières, Jacques TOUBON, le Médiateur de la République a pris des décisions courageuses. Mme Assa TRAORÉ a mobilisé, massivement, les jeunes et personnes de toutes les couleurs pour un bien-vivre ensemble, pour que Justice soit aux familles des 113 jeunes étouffés à mort par les forces de l'ordre.
En dépit de cela, une Macronie lepénisée et vichyste, entend faire voter un projet sur le séparatisme. Diverses réformes injustes, qui ne sont que suspendues, peuvent être, à tout moment, réactivées. Les racisés seront plus que jamais mobilisés contre toutes les formes d'injustices. Assa TRAORE a soulevé un espoir en mobilisant les racisés contre les violences policières et les injustices, il faudrait que ce mouvement se structure et acquiert une dimension nationale, avec toutes les forces de progrès, pour le bien-vivre ensemble.
En Afrique, des mouvements populaires (Mali, Côte-d'Ivoire, Guinée Conakry) se sont levés pour chasser des régimes monarchiques et préhistoriques corrompus, à la solde de la Françafrique. Les Africains aussi réclament la Justice dans les relations, à la place de la violence, de la prédation et du fouet de la part de l’ancien colonisateur. Soucieux de vivre, dignement, dans la liberté et la souveraineté, en vue de sortir de la servitude, du paternalisme et de la minorité, les peuples africains crient : «Respect et coopération mutuellement avantageuse !». C’est en cela que leurs exigences de Justice rejoignent les combats que mènent les Noirs Américains, dont nous sommes profondément solidaires.
Notre époque lourde de menaces oscille entre le Chaos et la Lumière. La Justice et l'Harmonie vaincront les Ténèbres. Donald TRUMP et Emmanuel MACRON ne seront que les présidents d'un seul mandat.
Paris le 22 août 2020 par Amadou Bal BA - http://baamadou.over-blog.fr/
«Derrière l’œuvre cruciale de Gisèle Halimi, on trouve un principe clair : le combat pour la dignité humaine. Contre la répression coloniale en Algérie, elle s’illustra par son courage et la force de sa conviction. Son action déterminante contribua à éclairer les consciences sur les atrocités et l’illégitimité du colonialisme» écrit Jack LANG, ministre de la culture, sous François MITTERRAND (1916-1996). Le président Emmanuel MACRON a écrit «La France perd une républicaine passionnée qui, comme avocate, militante et élue, fut une grande combattante de l’émancipation des femmes». Les hommages rendus à Gisèle HALIMI sont, pour l’essentiel, saucissonnés, tronqués et centrés sur l’action de défense des droits de la femme, occultant ou éclipsant ainsi, gravement, le combat en faveur des colonisés. La prétention de la lutte féministe en France recèle de graves ambiguïtés. Si elle signifie libérer la femme, victime de divers asservissements et violences, on ne peut que partager et glorifier cette réclamation pour l'égalité, contre toutes formes de discriminations, comme l'avait dit Gisèle HALIMI : «La femme n'est pas une catégorie, pas plus que l'homme n'en est une. La femme est une moitié de l'humanité, l'homme en est l'autre moitié et, à l'intérieur de ces deux moitiés de l'humanité, il y a toutes les catégories, les jeunes, les immigrés, les vieux, les handicapés, etc. Ce qui compte, par conséquent, c'est de faire en sorte que la différence fondamentale entre ces deux moitiés, au lieu d'être une source d'infériorisation et d'une identité réductrice, soit au contraire une source d'enrichissement des hommes et des femmes» écrit Gisèle HALIMI, en 1995.
En réalité, et pour certaines personnes, comme Elisabeth BADINTER, le combat féministe, comme laïcité, sont devenus une bombe contre les racisés, une démarche paternaliste, et un outil haineux de stigmatisation des racisés, au service d'une hiérarchisation des cultures. La femme colonisée serait, en raison du patriarcat de l'Islamisme, par principe, soumise et craintive. Cette position de principe et idéologique, empêche ainsi de pointer du doigt toutes les violences faites aux femmes en Occident, dans ces sociétés, fondamentalement, machistes. Un Ministre de l'intérieur, Moussa DARMANIN, peut être accusé de viol, même s'il faudrait défendre, sans concession, le sacro-saint principe de présomption d'innocence, fouler aux pieds «la jurisprudence BALLADUR», écartant du gouvernement un ministre mis en cause. Le maintien de M. DARMANIN dans ses fonctions de 1er flic de France est un mauvais signal, une injure grave faite aux combats féministes que Gisèle HALIMI avait porté haut, et sans concession. Aussi, quelle sincérité et quelle authenticité faudrait-il accorder aux hommages du chef de l'Etat, à Gisèle HALIMI, qualifiée de «combattante de l'émancipation des femmes» ? Auparavant, le président MACRON avait évoqué, en termes peu respectueux, «le ventre des femmes africaines». Quand le chef de l’Etat parle de l'émancipation des femmes, de quelles femmes parle-t-il ? J'aime bien cette formule d'un homme politique intègre et sincère, Lionel JOSPIN : «on fait ce qu'on dit. On dit ce qu'on fait». N'est-ce pas Jean-Yves LE DRIAN, le Ministre des affaires étrangères, tout récemment, qui s'était trompé de destinataire de son SMS, au lieu de l'envoyer au président MACRON, l'a adressé, par erreur, à Ségolène ROYAL, qualifiée : «cette folle de Ségo» ?
Par ailleurs, Mazarine PINGEOT, la fille du président MITTERRAND, et une littéraire, a dénoncé cette victoire de l'extrémisme, au nom de l'éthique qui discrédite les combats féministes. Mazarine demande d'en finir avec le ressentiment, la vengeance, la délation et la vindicte. «Cette jeunesse, sans désir, est pleine de colère» écrit-elle dans une tribune du Monde, «ce mortel ennui qui me vient». Alors qu'on donne des leçons de féminisme aux racisés, certains grands prédateurs sexuels, avérés, n'ont jamais été inquiétés en France, comme ce réalisateur de cinéma, Roman POLANSKI, bien que condamné aux États-Unis, où il n'ose plus retourner, a été acclamé et honoré aux Champs-Elysées. Sans une enquête américaine, après l’affaire du Sofitel, il est probable que DSK aurait été, en 2012, président de ce pays. Dans le grand scandale causé par le prédateur sexuel, Jeffrey EPSTEIN (1953-2019), aux États-Unis, les victimes en France, attendent toujours une enquête sérieuse et un procès. Dans une autre affaire, Tarik RAMADAN est au gnouf, depuis longtemps, bien au chaud, en ces temps caniculaires. C'est donc encore, sur ce point, la persistance du privilège de l'homme blanc, s'il est puissant. Une question de classe sociale, ces violences, ce racisme institutionnel et systémique, à l'encontre des femmes, avec une indignation, toujours, particulièrement sélective.
Par conséquent, c'est ici l'occasion de mettre au centre du débat les vrais combats de Gisèle HALIMI qui était révoltée contre l’injustice, une question centrale de notre temps. «De la Tunisie à l’Algérie puis au Congo en passant par Bobigny (France)... Un bel itinéraire, non pas touristique mais professionnel, fait de droiture, de passion, de sens de la justice, de doutes aussi» écrit Martine BULARD, à propos de Gisèle HALIMI. «C’est une grande femme qui disparait aujourd’hui. Une combattante qui aura consacré sa vie à la défense des droits. Une vie de liberté, pour l’égalité et dans la fraternité. Gisèle Halimi était une figure, un modèle, indocile, rebelle, militante de toutes les causes qu’elle pensait justes, car la justice pour tous a toujours été le moteur de sa vie» écrit Mme Anne HIDALGO, maire de Paris. La presse algérienne lui a rendu un vibrant hommage : «Gisèle s’en est allée doucement, avec la grandeur et la générosité qui siéent aux femmes de sa trempe, avec la singularité qui la caractérisait, elle qui a fait de sa vie un combat de tous les jours pour les causes justes. Durant toute sa vie, Gisèle a mis un soin particulier à faire cohabiter le courage, l’intransigeance et la faculté d’aller au bout de ses actes» écrit Hamid TAHRI, dans «El Watan». «Le nom de Gisèle Halimi est lié au combat contre les oppressions et les injustice» écrit Nadia BOUZEGRHRANE, dans «El Watan». Gisèle HALIMI est une avocate engagée qui a «marqué des générations de femmes et d’hommes attachées aux valeurs universelles de liberté et d’égalité» et elle a défendu l’indépendance de son pays natal, la Tunisie » dit Kaïs SAIED, président de la Tunisie. En effet Gisèle HALIMI, de par ses origines très modestes tunisiennes et sa culture politique, était fortement engagée aux côtés des vaincus, de ceux qui souffrent et réclament Justice, dans une société fortement marquée par un esprit colonialiste et esclavagiste : «Gisèle HALIMI était cette trempe d’auteurs et de juristes de renom, d’hommes et de femmes, qui n’hésitaient pas à condamner la barbarie coloniale et les pratiques abjectes» dit Abdelmadjid TEBBOUNE, le président algérien.
Défenseuse des femmes, Gisèle HALIMI était aussi notre mère protectrice qui défendait la cause des colonisés : «J'ai voulu clore ce cycle par la Kahina. Dans son contexte historique, je l'ai fait vivre, aimer, guerroyer, mourir. Comme mon père Edouard-le magnifique, l'aurait peut-être imaginée. La Kahina était-elle son ancêtre ? Peut-être. L'ai-je aimée en la faisant revivre ? Oui. Passionnément» écrit Gisèle HALIMI dans la «Kahina», cette reine des Berbères dont l’histoire est magistralement racontée par Ibn KHALDOUN. «Mon grand-père paternel me racontait souvent, par bribes, l'épopée de la Kahina. Cette femme qui chevauchait à la tête de ses armées, les cheveux couleur de miel lui coulant jusqu'aux reins. Vêtue d'une tunique rouge - enfant, je l'imaginais ainsi -, d'une grande beauté, disent les historiens. [...] Devineresse, cette pasionaria berbère tint en échec, pendant cinq années, les troupes de l'Arabe Hassan» écrit Gisèle HALIMI, dans un récit autobiographie, en 1988, «Le lait de l’oranger». Féministe, oui, mais, Gisèle HALIMI a redonné vie à cette reine berbère de l'Aurès qui, au VIIème siècle, résista aux troupes du général arabe Hassan. Entre son amour pour Khaled, le neveu de son ennemi et son implacable désir de victoire, elle incarne le destin d'une femme exceptionnelle qui, jusqu'à la mort, commanda aux hommes, des montagnes de l'Aurès aux plaines de l'oued Nini. Gisèle HALIMI retrace cette tragédie romanesque avec passion et talent. En dépit des calomnies, des conspirations du silence, nous continuerons de réclamer l’égalité. Seules les femmes, largement encore discriminées, peuvent entendre et comprendre, nos aspirations légitimes pour une égalité réelle : «Ne vous résignez jamais !» tel est le titre d’un des ouvrages de Gisèle HALIMI. Evoquant son enfant elle dit dans un entretien accordé à «J’observais que les Tunisiens, finalement, étaient aussi méprisés que les femmes».
En «avocate irrespectueuse» de cette omerta des vainqueurs, Gisèle HALIMI c’était la Kahina des colonisés ; l’Afrique est fondamentalement maternelle. Dans «Fritna» (fortunée en arabe) Gisèle HALIMI nous conte l’essence même de l’amour maternel : «Ma mère ne m'aimait pas. Ne m'avait jamais aimée, me disais-je certains jours. Elle, dont je guettais le sourire -rare- et toujours adressé aux autres, la lumière noire de ses yeux de juive espagnole, elle dont j'admirais le maintien altier, la beauté immortalisée dans une photo accrochée au mur où dans des habits de bédouine, ses cheveux sombres glissant jusqu'aux reins, d'immenses anneaux aux oreilles (...), elle, ma mère dont je frôlais les mains, le visage pour qu'elle me touche, m'embrasse enfin, elle, ma mère ne m'aimait pas» écrit-elle. Dans la Tunisie sous protectorat français, Gisèle HALIMI avait fait l’expérience du racisme. Dès son enfance, Gisèle HALIMI est horrifiée par le racisme français à l’adresse des «Arabes», et à l’école, elle est confrontée à l’antisémitisme, sans parler du mépris grossier des garçons à l’égard des filles : «La Tunisie sous protectorat français offrait une assise privilégiée à la discrimination, à l’exclusion. Comme dans une construction qu’un architecte machiavélique aurait façonnée pour les besoins d’une politique, les maîtres européens dominaient Juifs et Arabes, séparés eux-mêmes les uns des autres par des cercles parallèles. Le Juif, français ou tunisien, tenant dans le plus parfait mépris l’Arabe, situé dans la partie inférieure» écrit-elle dans un article «mémoires du pays natal».
Avocate, femme politique et écrivaine, Gisèle HALIMI, décédée le 28 juillet 2020 à 93 ans, est née Zeiza Gisèle Elise TAIEB le 27 juillet 1927 dans une famille modeste à La Goulette, en Tunisie. D’une mère Séfarade, Fortunée METOUDI, dite Fritna, et d’un père d’origine berbère, Edouard TAIEB, un garçon de courses, dans un cabinet d’avocats et sera clerc de notaires, elle entre au barreau de Tunis en 1949 et poursuit sa carrière à Paris, à partir de 1956, à l’indépendance de la Tunisie. Mariée en premières noces à Paul HALIMI, un administrateur civil au ministère de l’agriculture, de 1949 à 1959, puis en secondes noces, le 21 février 1961 à Claude FAUX de 1961 à 2017, un ancien secrétaire de Jean-Paul SARTRE, avec comme témoins du mariage : Louis ARAGON et Jean LURCAT. La jeune Gisèle est attirée par les propos anticonformistes d’un oncle du côté paternel, qui est engagé au parti communiste tunisien. Gisèle HALIMI a le «malheur» de naître fille à une époque où ce genre est considéré comme une malédiction pour la famille. Enfant déjà, celle qui deviendra avocate ne supporte pas les injustices, et encore moins celles assignées aux petites filles. A 10 ans, elle entame une grève de la faim pour protester contre les tâches ménagères dont ses frères sont exemptés : «Pendant plus de huit jours, je ne mangeais rien. Je défaillais et ils ont eu très peur. Ma mère a fait venir ma grand-mère, qui était pour moi une icône, la tendresse. J'étais une inconditionnelle de ce qu'elle pouvait dire et conseiller. Et malgré cela, j'avais résisté. Alors ils ont cédé. Et je me souviens que ce soir-là, dans un petit cahier que j'appelais mon journal, j'avais mis : "J'ai gagné mon premier morceau de liberté» dit-elle. Les parents de la jeune Gisèle abdiquent : «première victoire féministe». Gisèle défie les sentiments religieux de sa famille juive en refusant d’embrasser la Mézouza avant d’aller en classe «Mon milieu était un milieu inculte, pauvre. Et comme [souvent] dans ces milieux incultes et pauvres, on se rabat sur la religion qui, toujours, asservit les femmes. La tradition, tout cela, faisait que les filles étaient là pour servir les garçons» dit-elle à Laure ADLER. A 16 ans, Gisèle décline un mariage arrangé, et peut aller faire ses études de droit et de philosophie en France. En 1949, Gisèle HALIMI devient avocate et s'inscrit au barreau de Tunis. Elle est la première femme du pays à participer à un concours d'éloquence, qu'elle remporte brillamment avec un sujet pour le moins précurseur : «Le droit de supprimer la vie». Au barreau de Tunis, stagiaire, elle défend un légionnaire déserteur d’un jour, "bat’ d’Af." du bagne de Foum Tataouine, pour avoir volé un sac de 3 kg de pomme de terre données à une famille tunisienne. 6 mois d’emprisonnement, «c’est le tarif». Pour un autre «bat d’Af» de Tataouine, qui n’est pas rentré au bagne pour suivre l’accouchement de sa femme, elle arrache par les "circonstances atténuantes", un mois d’emprisonnement déjà couvert. En 1953, le procès de Moknine offre une anticipation en mineur des procès militaires d’Algérie. 53 Tunisiens ont été arrêtés pour avoir participé de près ou de loin à des affrontements avec des gendarmes le 23 janvier 1952 ; trois condamnations à mort.
Native d’un pays colonisé, Gisèle HALIMI s’est forgée une sensibilité envers les opprimés du système mondial. Gisèle HALIMI a été sympathisante de la cause de Habib BOURGUIBA (1903-2000), un nationaliste tunisien, et son avocate : «J'étais une toute jeune avocate en Tunisie à l'époque. Et ses avocats parisiens, comme Bourguiba était exilé au nord de la Tunisie m'ont demandé si je voulais leur servir de Cicérone, les guider un peu. Et c'est comme ça que j'ai rendu visite à Bourguiba en exil et que je suis devenue son avocate. [...] On peut reprocher beaucoup de faits d'atteintes aux libertés [à Bourguiba]. Mais pour les femmes, il a toujours été tellement en avance que par moments, il n'a pas été compris» dit-elle. Gisèle HALIMI a surtout été l’avocate de la cause des Algériens, pendant leur guerre de libération ; cela a été soigneusement passé sous silence dans les différents hommages qui lui sont maintenant rendus. «L’injustice m’est physiquement intolérable. Toute ma vie peut se résumer à ça. Tout a commencé par l’Arabe qu’on méprise, puis le Juif, puis le colonisé, puis la femme», dit-elle au «Journal du Dimanche» en 1988. Enfant, Gisèle est témoin de la répression sanglante à Tunis d’une manifestation favorable à l’émancipation des Tunisiens, un épisode qui la marquera durablement : «J’avais onze ans lorsque éclata, à Tunis, la grande répression du 9 avril 1938 [une date charnière dans l’histoire du mouvement nationaliste tunisien]. Des mitraillettes tiraient dans la rue, des tanks barraient le boulevard Bab-Benat, des soldats, beaucoup de Noirs, des Sénégalais, j’en avais été frappée, sillonnaient, l’arme au poing, les ruelles de la Médina. Le sang coula, notamment à la Zitouna (université religieuse située alors dans la mosquée éponyme), où plusieurs étudiants furent abattus» écrit dans un article «Mémoires la Tunisie natale». Habib BOURGUIBA est arrêté et la répression fait 200 morts. La Tunisie voulait un Parlement, des libertés démocratiques, un gouvernement.
Gisèle HALIMI deviendra ainsi une des avocates emblématiques de la cause anticoloniale. Licenciée en droit et en philosophie à Paris, élève de Sciences Po, la jeune femme s’inscrit au barreau de Tunis en 1949 et défend des syndicalistes et des indépendantistes tunisiens. C’est là le premier volet de sa carrière professionnelle, poursuivi à Paris et en Algérie où elle devient l’une des principales avocates des militants du Front de libération nationale (FLN). Avocate à Tunis, Gisèle HALIMI a d’abord commencé à défendre les légionnaires déserteurs et les syndicalistes au Barreau de Paris à partir de 1956. Après l’assassinat, le 26 décembre 1956, du maire de Boufarik et président des maires d’Algérie, Amédée FROGER (1882-1956), avec l’avocat de gauche, Yves DECHEZELLES (1912-2007), elle assure la défense de celui que la police présente au tribunal militaire comme étant l’exécuteur : Badèche BENMADI, originaire de Bou Saâda, sans preuves autres que des aveux extorqués après 11 jours de tortures. En mai 1958, elle est arrêtée et détenue par les paras en Algérie. Gisèle HALIMI faisait partie du collectif de 26 avocats qui défendaient ce qu’on appelle les «porteurs de valises». En effet, le 5 septembre 1960, 23 personnes comparaissent devant le Tribunal permanent des forces armées de Paris pour «atteinte à la sûreté extérieure de l’Etat». Ce réseau dit de porteurs de valises, réuni autour du philosophe Francis JEANSON (1922-2009), dont Hamada HADDAD, chef fédéral du FLN et Hamini ALIANE, engagé aux côtés de l’Algérie libre, logeait les membres du FLN et transportait vers le Maghreb des faux papiers ou des sommes d’argent. Le gouvernement croit sans doute vouer les accusés à l’opprobre et pourfendre spectaculairement la trahison. Mais au bout de quelques jours, la situation se trouve renversée et le procès se transforme en arène politique : «C’est le gouvernement, l’armée, leur politique, c’est la guerre d’Algérie tout entière dont le procès commence. Accusés, témoins, avocats, débordant un tribunal stupéfait, transforment le prétoire en tribune de l’opposition» écrit Marcel PEJU dans «le procès du réseau Jeanson». 121 intellectuels, dont Maurice BLANCHOT (1907-2003) et Simone de BEAUVOIR (1908-1986), publient le 6 septembre 1960, «une Déclaration sur le droit à l’insoumission dans la guerre d’Algérie». Dans une lettre, Jean-Paul SARTRE (1905-1980), apporte aux «porteurs de valises» son soutien en ces termes : «Ce (que les porteurs de valises) représentent, c’est l’avenir de la France, et le pouvoir éphémère qui s’apprêtent à les rejuger ne représente rien». Cependant, au 8ème jour du procès, Gisèle HALIMI, en désaccord avec le concept de Jacques VERGES de «défense de rupture», fit une déclaration fracassante, pour annoncer qu’elle renonçait à défendre sa cliente, France BINARD, dite Véra HAROLD, une poétesse et céramiste.
En rivalité avec Jacques VERGES (1924-2013) qui défendait d’autres indépendantistes, comme Djamila BOUHIRED, une autre affaire marquera, profondément, les faits d’armes et la gloire de Gisèle HALIMI, en qualité d’avocate des Algériens. Le 20 août 1955, dans le village d’El Halia, à quelques kilomètres de Philippeville (Skikda), des insurgés algériens s’en prennent aux habitations et à la mine, massacrant une trentaine d’Européens. S’ensuit aussitôt une terrible répression. Il faut des coupables. Un procès des auteurs présumés de ce massacre s’ouvrira le 17 février 1958 à Philippeville. Alors jeune avocate de 31 ans, Gisèle HALIMI assure la défense des accusés. Malgré le doute qui pèse ainsi sur le dossier d’accusation, le commissaire du gouvernement demande neuf condamnations à mort. Il en obtiendra quinze. Le 9 avril 1958, à Alger, procès en cassation : le jugement de Philippeville est annulé. Au cours du second procès, à Constantine, le commissaire du gouvernement déclare le 28 octobre 1958 que «les résultats de l’autopsie contredisent en tous points les aveux». En fait, trente-quatre accusés sont acquittés. Maîtres HALIMI et MATARASSO ont gagné un procès délicat. En 2001, les aveux de Paul AUSSARESSES (1918-2013) sur l'exécution sommaire des soixante suspects de la tuerie d'el-Halia, en 1955, conduisent maître HALIMI à réclamer la réouverture d'un des dossiers judiciaires les plus symboliques de la «sale guerre», la justice ayant été instrumentalisée par les militaires. Paul AUSSARESSES, sans fausse honte et sans complaisance, a osé dire une vérité raconter la torture et les exécutions sommaires en Algérie. En effet, Paul AUSSARESSES, informé de l'offensive du FLN visant Philippeville et d'autres villes et villages du Constantinois, reconnaît d'ailleurs l'avoir laissée se développer afin de pouvoir mieux la «contrôler» et l'étouffer dans le sang. De fait, ces affrontements et atrocités donnèrent l'occasion d'une répression sauvage. La troupe ratissa la contrée, incendiant au napalm, exécutant sommairement des centaines de personnes, faisant en quelques jours des milliers de victimes algériennes. Des mineurs d'el-Halia furent accusés d'avoir pris part en masse au massacre des Européens, arrêtés, mis au secret pendant onze mois, torturés par les enquêteurs militaires. Le général Paul AUSSARESSES a été condamné, le 25 janvier 2002, à 7 500 € d’amende par la 17e chambre correctionnelle de Paris, pour «apologie de crimes de guerre», après la publication, le 3 mai 2001, de son ouvrage, «Services spéciaux, Algérie, 1955-1957».
Début janvier 1957, Gisèle HALIMI, dénonçant la torture, les disparitions et les procès expéditifs conduisant à la guillotine, l’avocate est arrêtée à l’hôtel Aletti et expulsée d’Algérie sur ordre du secrétaire général de la préfecture de police d’Alger, Paul TEITGEN (1919-1991) ; celui-ci, quand lui-même aura démissionné en dénonçant les disparitions de détenus, lui en donnera la raison ; elle risquait la mort pour le lendemain, tant les menaces du milieu colonial activiste étaient précises. 3024 personnes disparaîtront après la bataille d’Alger, en 1957. En 1960, Gisèle HALIMI défend Djamila BOUPACHA, née en 1938, aide-soignante à Beni-Moussa, cette militante algérienne du FLN accusée d'avoir posé une bombe à Alger en 1959 et qui fut torturée et violée par des parachutistes français. Le 2 juin 1960, son amie Simone de BEAUVOIR (1908-1986) publie dans «Le Monde» une tribune «pour Djamila Boupacha» dans laquelle elle écrit : «ce qu'il y a de plus scandaleux dans le scandale c'est qu'on s'y habitue. Il semble pourtant impossible que l'opinion demeure indifférente à la tragédie qu'est en train de vivre une jeune fille de vingt-deux ans, Djamila Boupacha». En septembre 1959 une bombe, qu'on désamorça avant qu'elle eût explosé, fut placée à la Brasserie des Facultés d'Alger. Cinq mois plus tard Djamila BOUPACHA fut arrêtée. Son procès va s'ouvrir le 17 juin ; aucun témoin ne l'a identifiée, il n'existe pas contre elle l'ombre d'une preuve. Pour établir sa culpabilité il fallait des aveux : on les a obtenus. Dans la plainte en séquestration et tortures qu'elle vient de déposer, Djamila les rétracte et elle décrit les conditions dans lesquelles elle les a passés. Un grand nombre de témoins dont elle cite les noms et les adresses sont prêts à confirmer les faits qu'elle rapporte. La nuit du 10 au 11 février, une cinquantaine de gardes mobiles firent irruption dans le domicile où Djamila vivait avec ses parents. Ils la battirent ainsi que son père et son beau-frère, et ils emmenèrent les trois suspects à El-Biar. Là, les militaires, dont un capitaine parachutiste, piétinèrent Djamila et lui défoncèrent une côte. Cinq jours plus tard elle fut transférée à Hussein-Dey, où les forces de l’ordre lui administrèrent «le second degré». On lui fixa des électrodes au bout des seins avec du papier collant Scotch, puis on les appliqua aux jambes, à l'aine, au sexe, sur le visage. Des coups de poing et des brûlures de cigarettes alternaient avec la torture électrique. Ensuite on suspendit Djamila par un bâton au-dessus d'une baignoire et on l'immergea à plusieurs reprises. «On ne va pas te violer, ça risquerait de te faire plaisir», lui dirent, les hommes qui la questionnaient. Et Djamila BOUPACHA précise : «On m'administra le supplice de la bouteille ; c'est la plus atroce des souffrances ; après m'avoir attachée dans une position spéciale, on m'enfonça dans le ventre le goulot d'une bouteille. Je hurlai et perdis connaissance pendant, je crois, deux jours» dit-elle. Face aux violences de l’Armée endurée par Djamila BOUPACHA, l’écrivaine, Simone de BEAUVOIR écrit : «Il est temps de leur prouver que dans cette Algérie qu'ils disent française ils ne peuvent pas violer impunément les lois de la France». Gisèle HALIMI, révélera, plus tard, le rédacteur en chef adjoint du «Monde» avait censuré le mot «vagin» utilisé par Simone de BEAUVOIR dans ce texte afin de décrire le viol de Djamila BOUPACHA par le goulot d'une bouteille. L’affaire Djamila BOUPACHA est un témoignage accablant contre le colonialisme, ses crimes, la torture et la raison d'État : «Depuis, 1954, nous sommes tous complices d’un génocide qui, sous le nom de répression, puis de pacification, a fait plus d’un million de victimes» écrit Simone de BEAUVOIR dans la préface du livre consacré à Djamila BOUPACHA. Il y a des cœurs rétifs à la honte, mais ce livre est une violente dénonciation du mensonge sur la guerre d’Algérie. Quoi qu’il en soit, le procès a mobilisé l'opinion publique sur les exactions de l'armée française en Algérie. Djamila BOUPACHA est finalement jugée en France, à Caen, en 1961. En dépit de la brillante plaidoirie de Gisèle HALIMI, elle est condamnée à mort, mais sera amnistiée et libérée en 1962 après les accords d’Evian qui mettent fin à la guerre d’Algérie. Devenue avocate des causes difficiles, un jour opposé à Robert BADINTER, elle avait commencé sa plaidoirie en disant : «Je ne me laisserai pas renvoyer à mes fourneaux par le professeur Badinter».
Solidaire avec les dominés, Gisèle HALIMI disait «Je ne veux pas me taire», à propos de la Palestine et du sort de Gaza. Membre du collectif d'avocats de Marwan BARGHOUTI, l’avocate des sans-voix disait : «J’ai participé au premier tribunal Russell, celui que présidait Jean-Paul Sartre sur les crimes américains au Vietnam. Je me souviens du jour où le grand Bertrand Russell nous a convoqués à Londres et a dit : «Maintenant, cela suffit avec le crime de silence» J’espère que cette fois aussi nous réussirons à briser le silence". Quant à la solution ? "Quand on est là-bas, elle est une évidence : mettez fin à l'occupation israélienne, et l'aurore se lèvera. Si les troupes se retirent, les voix de la paix se feront entendre» disait-elle. Gisèle HALIMI a toujours défendu les Palestiniens «Le peuple palestinien est en train de se faire massacrer, une armé le tenant en otage. Pourquoi ? Quelle cause défend ce peuple et que lui oppose-t-on ? J’affirme que cette cause est juste et sera reconnue comme telle dans l’Histoire» dit Gisèle HALIMI. Elle ne veut pas se taire et se résigner devant de graves injustices : «Je veux crier fort pour ces voix qui se sont tues et celles que l’on ne veut pas entendre. L’Histoire jugera mais n’effacera pas le saccage des innocents. Le monde n’a-t-il pas espéré que la Shoah marquerait la fin définitive de la barbarie ?» dit Gisèle HALIMI. Même après les indépendances, Gisèle HALIMI poursuivra sa lutte anticolonialiste. En 1967, elle préside la commission d’enquête du Tribunal Russel sur les crimes de guerre américains au Vietnam. En 1973, elle va défendre au Congo-Brazzaville, des coopérants accusés de complot par les continuateurs des pratiques coloniales après les indépendances mêmes.
En définitive, Gisèle HALIMI témoigne, dans sa vie femme d’un parcours original, à la fois cohérent et multidimensionnel, le refus de la soumission et du rôle des assignés, la dignité de l’Homme, les droits des femmes et la lutte contre les discriminations, une trajectoire donc marquée par la constance et la radicalité. Députée socialiste en 1981, de 1984 à 1985, chargée de mission par le Premier ministre et ambassadrice déléguée de la France auprès de l’Unesco, puis présidente du comité des conventions et des recommandations de l’Unesco jusqu’en 1987, Conseillère spéciale de la délégation française à l’Assemblée générale de l’ONU en 1989, rapporteuse pour la parité entre hommes et femmes dans la vie politique, Gisèle HALIMI aura mené d’intenses activités pour l’égalité réelle.
Parallèlement à cela, la contribution littéraire de Gisèle HALIMI particulièrement riche : une «écriture est liée à la vie : elle est un cri d’amour. Ecrire est aussi une révolte contre l’injustice jusqu’à l’infini, pour oublier le souvenir d’un manque parfois aussi douloureux mais salutaire dans la mesure où est-il exhibé» dit Nabila HASSANI. Mère de trois garçons (Serge HALIMI du Monde diplomatique, Yves HALIMI, avocat et Emmanuel FAUX, journaliste), Gisèle HALIMI a confié qu’elle aurait aimé avoir une fille pour «mettre à l’épreuve» son engagement féministe.
Les obsèques de Gisèle HALIMI auront lieu le jeudi 6 août 2020, au cimetière Père Lachaise, à Paris.
Références bibliographiques