A l’initiative de l’association «Intercultura du 20ème», sous la présidence M. Hamidou SAMAKE, adjoint à la Maire de Paris, avait lieu une conférence, le vendredi 25 mars 2022, à la salle des fêtes de la mairie du 20ème arrondissement, et animée par l’écrivain, M. Seidik ABBA : «Mali-Sahel, notre Afghanistan à nous ?».
Cette conférence se tient dans un contexte particulier. La Cour de justice de l’Union économique et monétaire ouest-africaine, (UEMOA), dans une décision du 24 mars 2022, vient de suspendre les sanctions de la CEDEAO à l'égard du gouvernement malien. Pour le gouvernement malien, ces sanctions décidées par la conférence des chefs d’Etat, risquent d’entraîner des «conséquences difficilement réparables au regard de l’impact social, économique et financier». Sans se prononcer sur la légalité des sanctions, la Cour de Justice de l’UEMOA a estimé que compte tenu de l’urgence et du motif sérieux invoqué, les mesures, jugées «gravement préjudiciables», non seulement à l’Etat malien mais aux Maliens eux-mêmes, sont suspendues. Ces sanctions touchent également le Sénégal ; le Mali étant un pays enclavé, l'essentiel de ses marchandises transitent par le port de Dakar.
Par ailleurs, la situation malienne est appréciée au regard de la résurgence des coups d’Etat militaires en Afrique et de la Guerre froide, en raison de l’invasion de l’Ukraine par le Tsar des Russies. D’une manière générale, la politique africaine de la France, comme au bon vieux temps de la Françafrique du Général de GAULLE (1890-1970) et de Jacques FOCCART (1913-1997) est remise en cause par les populations africaines, dénonçant cette indépendance dans la dépendance. L’intervention française au Mali, n’a pas résolu la question de la sécurité au Nord du pays. Pire, le gouvernement malien n’avait pas le droit de se rendre à Gao, une sorte de partition du pays, qui ne disait pas son nom, sans combattre les djihadistes. Certaines mauvaises langues s’interrogent : comment la France a pu devenir le 4ème producteur mondial d’or ?
Aussi, M. Choguel MAIGA, premier ministre du Mali, lors de son discours en septembre 2021 au Nations Unies, a reproché au président MACRON «d’abandonner le Mali en plein vol». Je rappelle, qu'en 2012, la suite de l’assassinat du président Mouammar KADHAFI (1942-2011), et Nicolas SARKOZY, selon Médiapart, serait fortement impliqué dans ce crime, diverses bandes de terroristes se sont éparpillées dans d'autres pays du Sahel, notamment au Mali.
Finalement, le Mali est un débat erroné, dévoyé et instrumentalisé, c'est pour cela qu'il est difficile d'y voir clair, notamment la faillite de l'Etat colonial et la mise en place d'une Françafrique pour un continent de 33 millions de kilomètres carrés riche de ses matières premières.
La relation entre le Mali et ses partenaires oscille entre l’Amour et la répulsion. C’est le pèlerinage à la Mecque, en 1324, de Kankan Moussa, 10ème Mansa du Mali de 1312 à 1337, qui a suscité toutes les convoitises des Occidentaux à l’égard de l’Afrique. Suivant, Ibn KHALDOUN (1332-1406), on pouvait extraire 3 à 4 tonnes d’or par an, au Mali. Aussi, les Portugais, à l’époque, les plus grands navigateurs, ont entamé la conquête de l’Afrique. L’Empire du Mali a pendant longtemps dominé mon Fouta-Toro, le Nord du Sénégal. C’est à la suite de l’assassinat de son père que le Satigui, Coly Tenguella BA est venu conquérir et unifier le Fouta-Toro. En ce sens l’islamisation du Mali par El Hadji Omar TALL, par la guerre sainte, a laissé des traces profondes entre les deux peuples. C’est par le Sénégal, que le colonisateur qui voulait tracer la chemin de fer Dakar-Niger, que la «pacification» est arrivée. Les descendants de El Hadji Omar TALL (1794-1864), notamment Aguibou TALL (1843-1907), devenu le Fama à Bandiagara, ont participé à la défaite du Mali, un peuple millénaire. Dans cette relation faite d’amour et de répulsion, l’éphémère Fédération du Mali, la non reconnaissance de Lamine GUEYE (1891-1968), un saint-louisien, originaire de Médine, et le renvoi brutal par Léopold Sédar SENGHOR (1906-2001) de la délégation de Modibo KEITA (1915-1977), proche du camp soviétique, n’ont pas arrangé les choses.
Où va donc le Mali ?
Les fils du dialogue n’étant pas rompus, il est possible de trouver entre le gouvernement malien et la CEDEAO un accord sur un délai de transition raisonnable et un gouvernement d'union nationale, dans le respect de la souveraineté de ce pays.
Je le redis la France a encore sa place en Afrique, à condition de retrouver le chemin du dialogue, de la coopération mutuellement avantageuse et du respect de ses partenaires historiques. Certaines méthodes coloniales brutales et méprisantes sont à proscrire. Le Mali appartient aux Maliens.
Militant du bien-vivre ensemble, je crois en la République et en la démocratie. M. Choguel MAIGA a chassé du pouvoir, par la voie pacifique, l’indolent IBK (1945-1922). Le premier ministre malien, un homme d’Etat, saura trouver les ressources nécessaires, pour remettre le Mali sur le bon chemin.
Références
ABBA (Seidik), Mali-Sahel, nôtre Afghanistan à nous ?, Paris, Impacts, 2022, 150 pages ;
MAIGA (Choguel, Kollala), SINGARE (Issiaka, Ahmadou), Les rébellions au Nord du Mali, des origines à nos jours, Bamako, (Mali), Edis, juin 2018, 452 pages ;
Cour de Justice de l’Union économique et monétaire Ouest-africaine, UEMOA, ordonnance n°06/2022/CJ du 24 mars 2022.
Paris, le 25 février 2022 par Amadou Bal BA - http://baamadou.over-blog.fr/