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Acteur de cinéma, particulièrement talentueux, Chadwick Aaron BOSEMAN, né le 29 novembre 1976, à Anderson, en Caroline du Sud, est mort, prématurément, du cancer du côlon, le 28 août 2020, à Los Angeles.
Depuis le début de sa carrière en 2003, Chadwick BOSEMAN est surtout connu pour avoir joué dans des séries télévisées, comme «Les Experts», «Lie To Me» ou encore «Fringe». Après un petit rôle dans «The Express» en 2008.
Très tôt, il s’est fait remarqué dans ses interprétations de Jackie ROBINSON (1919-1972), le drame sportif 42. Ce film de Brian HELGELAND, en 2013 retrace la vie et l’intégration dans la ligue de baseball de cette légende noire du football américain, Jackie ROBINSON qui est le premier à avoir joué dans de grands clubs. En 1945, le riche propriétaire des Dodgers de Brooklyn, Branch RICKEY, décide qu’il est temps qu’un jour noir puisse évoluer avec des blancs. Il recrute alors Jackie ROBIN, un joueur électrisant, rapide et cogneur. Jackie est aidée par son épouse Rachel et un journaliste noir pour surmonter les obstacles de la ségrégation raciale et démarre en 1947 avec les Dodgers. Par conséquent, l'histoire se déroule en pleine ségrégation raciale, et nous montre le parcours difficile de Jackie ROBINSON pour se faire accepter dans un milieu raciste, et devenir plus tard un symbole pour l'égalité sociale. Jackie ROBINSON a un jeu intuitif et rapide, la formidable aptitude à dépasser d'insultes racistes des spectateurs et des autres joueurs ; ce qui a fait de lui le pionnier, le leader, et un représentant héroïque des noirs américains. Il a ouvert la voix, dans un sport maintenant composé à 70% de Noirs.
Chadwick BOSEMAN interprétera, en 2014, le rôle de James BROWN, un biopic musical «Get on Up». Il a failli refusé ce rôle, ne souhaitait pas «interpréter à nouveau une personne réelle, encore moins une aussi iconique». Il a donc appris à «être James Brown». Chadwick est complètement devenu le personnage de James BROWN, mélangeant la Soul et le Funk, en saisissant sa voix rauque et râpeuse. La société de production de Mick JAGGER est à l’origine de biopic «J’ai volé à James Brown tout ce que j’ai pu» dira Mick JAGGER, un musicien fasciné et fortement influencé par James BROWN. Spike LEE pressenti pour diriger ce film l’a abandonné en 2012 au profit de Tate TAYLOR, le réalisateur de «la couleur des sentiments». C’est un film sans concession sur la vie de James BROWN, ses côtés sombres, ses moments de violence, ses abus de drogue et ses relations explosives avec ses musiciens : «J'ai rencontré beaucoup de membres de sa famille. Ils avaient envie de montrer tous les aspects de James et on en a beaucoup parlé avec eux. On a même regardé le film tous ensemble et ils réagissaient en direct. Les génies sont souvent des personnages complexes» dit Tate TAYLOR, le réalisateur.
Le film montre l’enfance de James BROWN (1933-2006) où il vit avec un père violent et encaisse l'absence de sa mère, puis l'on suit James BROWN pendant ses premiers gospels et jusqu'à ses immenses succès, «I Got You», «I Feel Good», «Please, Please, Please» ou «Get Up» ou «I Feel Like Being a Sex Machine». James BROWN ou Mister Dynamite, est «un personnage complexe, politique et si important dans la musique» dira Chadwick BOSEMAN. En effet, James BROWN est décrit par ses détracteurs comme étant comme un génie capricieux et hors de contrôle. «J'ai essayé de ne pas penser à son importance historique, explique l'acteur, mais j'ai voulu comprendre qui était cet enfant de Caroline du Sud, abandonné par ses parents, délinquant juvénile… Et de voir comment il devient cette homme que l'on respecte pour sa musique et qui nous intrigue politiquement» dit Chadwick BOSEMAN. James BROWN est un personnage de Groove, un danseur sexy sur scène : «J'ai mis deux mois à me prépare. Chaque jour, j'avais des cours de danse, au début trois heures par jour, puis jusqu'à cinq heures de répétition quotidienne. J'écoutais de la musique toute la nuit» dit Chadwick BOSEMAN.
Le film montre aussi l’engagement de James BROWN, aux côtés de la communauté noire, la scène plus importante du film est celle des émeutes de Boston. Engagé contre la guerre au Vietnam, James BROWN rendu hommage à Martin Luther KING assassiné le 4 avril 1968, «L’Amérique a perdu à ce moment-là son meilleur ami, et une majorité d’Américains ne s’en rendait même pas compte» dit l’artiste. «Vous êtes un grand homme, vous avez fait des choses incroyables, mais je ne vous suis pas sur la non-violence. Si quelqu’un me bat, je le bats à mon tour» ajoute James BROWN. En effet, au lendemain de l’assassinat de Martin Luther KING, l’artiste James BROWN empêche les jeunes de la ville d'entrer en conflit avec la police. «C'était important pour moi de montrer que ces gamins avaient une expérience émotionnelle de l'assassinat de King, et ils avaient besoin de Brown pour traverser cette épreuve, pour les aider. Je voulais qu'on comprenne toutes les implications de cette scène. James Brown était un penseur libre et je voulais que ça se ressente. Les Afro-Américains ont une histoire qui a des milliers d'années et qui s'est perdue dans l'esclavage. Il faut essayer de se retrouver une place, de progresser, de s'élever dans la société contre une culture opprimante. C'est ce que représente sa musique» dit le réalisateur.
En 2017, Chadwick BOSEMAN jouera, sous la direction de Reginald HUDLIN, le rôle du juge Thurgood MARSHALL, premier juge noir à la Cour suprême des Etats-Unis, dans «Marshall, la vérité sur l’affaire Spell». Dans ce film, alors qu’il est encore avocat de la NAACCP, et que l’Amérique est encore confrontée à ses démons de la ségrégation raciale, Thurgood MARSHALL est envoyé dans un Connecticut conservateur et raciste, afin de défendre un chauffeur noir dans un très public procès pour agression sexuelle et tentative d'assassinat. Marshall se voit associé à Samuel FRIEDMAN, un jeune avocat juif qui n'a jamais défendu un client. Ensemble, ils luttent contre une vague de peur et de préjugés, mais parviennent à découvrir la vérité dans ce procès dramatisé qui annonce le Mouvement des Droits Civiques à venir. Une défense se dresse habilement autour de ce dernier et nous redécouvrons les vestiges de l’esclavage, à savoir une inégalité morale et éthique. Thurgood Marshall vient alors de la Cour Suprême afin de soutenir devant celle qui décidera du sort de SPELL. La justice est impartiale sur le plan théorique ; Ce que le duo combat, c’est le préjugé. Il est difficile d’obtenir Justice alors qu’une ethnie porte un lourd fardeau, l’asservissement du Noir depuis la nuit de l’esclavage. On sent le système oppressif mis en place contre les Noirs qui ont du mal à se faire entendre.
En 1954, Thurgood MARSHALL, alors qu’il était avocat, avait plaidé, avec brio, devant la Cour suprême dans l’affaire historique «Brown v. Board of Education» qui allait mettre fin à la ségrégation dans les écoles publiques aux États-Unis. Grand nom du mouvement en faveur des droits civiques et juriste éminent, Thurgood MARSHALL (1908-1993), né dans un quartier pauvre de Baltimore, a été le premier Noir américain à siéger à la Cour suprême, à partir du 2 octobre 1967. «L’enfant d’une mère noire né dans un État comme le Mississippi a exactement les mêmes droits qu’un bébé blanc né dans la famille la plus nantie des États-Unis. Ce n’est pas le cas, mais je défie quiconque de dire que ce n’est pas objectif qui mérite des efforts» avait-il dit en 1988.
Mais Black Panther, en 2018, avec la musique du sénégalais, Baaba MAAL, que Chadwick a littéralement conquis la planète. Chadwick avait incarné le personnage T’Challa, un super héros noir, souverain du royaume imaginaire, d’Afrique Equatoriale, du Wakanda. Les Wakandais vivent sur un gigantesque gisement de vibranium, métal aux propriétés merveilleuses qui leur a permis de développer une technologie dépassant de loin celles des pays les plus développés. Depuis des temps immémoriaux, le roi du Wakanda reçoit, en même temps qu’il monte sur le trône, des pouvoirs surhumains qui font de lui, quand le besoin s’en fait sentir, un guerrier quasiment invincible, «Black Panther». T’Challa vient de succéder à son père assassiné par un terroriste international, et affrontera plus d’épreuves qu’Hamlet et Winston CHURCHILL réunis.
Chadwick BOSEMAN à la veille des présidentielles américaines, compte tenu des violences policières contre les Noirs et des menaces d’un deuxième mandat de Donald TRUMP, a laissé dans une vidéo son testament : il a exhorté les jeunes d’aller voter le 3 novembre 2020.
Paris le 29 août 2020 par Amadou Bal BA - http://baamadou.over-blog.fr/